Système de responsabilités (Composante)
Résumé
Le système de responsabilités est l’une des composantes satellites de la structure d’ensemble. Celle-ci a été publiée pour la première fois par Gilles Gendreau en 1978 dans le livre «L’intervention psycho-éducative Solution ou défi?». Elle a depuis été améliorée et retravaillée notamment par Gendreau (Gendreau 2001; Gendreau, Prince, & Bernier, 2005) et Renou (2005)
Le système de responsabilité peut être défini comme l’ensemble des tâches, des rôles et des fonctions que le jeune, les éducateurs et les autres personnes du milieu doivent assumer afin que chacun participe de façon efficiente à la démarche de réadaptation et à la bonne marche générale du milieu (Gendreau 2001). Cette composante peut donc s’appliquer tant aux sujets, au groupe de pairs, aux éducateurs, à l’éducateur professionnel désigné, au chef de service et aux parents.
L’objectif de cet article est de permettre au lecteur de se familiariser avec le concept de système de responsabilité dans le cadre de la structure d’ensemble, ainsi qu’avec son application pratique.
1) Quelle est l’importance de ce concept dans la théorie psychoéducative?
La structure d’ensemble est l’un des concepts théoriques majeurs en psychoéducation. Son utilisation est d’ailleurs l’une des caractéristiques qui tendent à distinguer la psychoéducation des autres disciplines sociales. Le système de responsabilité en tant que composante de celle-ci est donc essentiel.
2) Quel est le niveau de connaissance associé à ce concept?
Les recherches associées à ce sujet sont surtout liées à l’empowerment et à l’implication parentale. Chacun de ces domaines dispose de plusieurs recherches soutenant leur impact sur l’efficacité des traitements.
3) En quoi ce concept est-il important dans la pratique psychoéducative aujourd’hui?
La structure d’ensemble est l’un des concepts théoriques majeurs en psychoéducation. Son utilisation est d’ailleurs l’une des caractéristiques qui tendent à distinguer la psychoéducation des autres disciplines sociales. Le système de responsabilité en tant que composante de celle-ci est donc essentiel.
Le système de responsabilités est l’une des composantes satellites de la structure d’ensemble. Elle fut développée par Gilles Gendreau et ses collaborateurs et publiée pour la première fois en 1978 dans l’ouvrage «L’intervention psycho-éducative : solution ou défi? ».
Le système de responsabilité peut être défini comme l’ensemble des tâches, des rôles et des fonctions que le jeune, les éducateurs et les autres personnes du milieu doivent assumer afin que chacun participe de façon efficiente à la démarche de réadaptation et à la bonne marche générale du milieu (Gendreau 2001) Cette composante peut donc s’appliquer tant aux sujets, au groupe de pairs, aux éducateurs, à l’éducateur professionnel désigné, au chef de service et aux parents.
L’objectif de cet article est de permettre au lecteur de se familiariser avec cette composante tout d’abord sur le plan théorique et ensuite sur le plan clinique. . Dans un premier temps, la composante système de responsabilités sera définie. Par la suite, ses applications en fonction des différents acteurs de la structure d’ensemble seront expliquées. Finalement, les applications pratiques et les études empiriques faites sur cette application seront brièvement abordées avant de terminer par une courte conclusion.
Définitions
Dans sa première publication concernant la structure d’ensemble, Gendreau (1978) présentait le système de responsabilité comme étant l’ensemble des exigences ou des tâches réelles, reliées à des rôles délimités nécessaires au fonctionnement de la structure d’ensemble du milieu ou de ses éléments. De manière plus stricte, il prend l’allure d’un schéma de répartition des tâches appelant des rôles au sein de la structure. On peut citer en exemple les tâches à accomplir qui correspondent à l’aspect logique et rationnel de l’ensemble organisationnel. Le système de responsabilité s’envisage donc sous un double aspect à savoir celui des sujets et celui des animateurs.
Par la suite, Gendreau (2001) a redéfini cette composante comme étant l’ensemble des tâches, des rôles et des fonctions que le jeune, les éducateurs et les autres personnes du milieu doivent assumer afin que chacun participe de façon efficiente à la démarche de réadaptation et à la bonne marche générale du milieu.
Poursuivant la réflexion, Renou (2005) a proposé de définir le système de responsabilité comme étant l’ensemble des fonctions, des rôles et des tâches des différents acteurs nécessaires au fonctionnement du milieu ou à la réalisation d’une activité du programme général ou de l’un des programmes spécifiques.
Finalement, dans le cadre des recherches menées à Boscoville 2000 (Gendreau, Prince & Bernier, 2005b), certaines précisions ont été apportées. Tout d’abord, afin de soutenir la démarche du sujet vers l’atteinte de ses objectifs, il a été jugé nécessaire que le système de responsabilité soit développé en tenant compte de la logique organisationnelle de l’activité, du programme ou de l’intervention. De plus, il doit considérer le niveau d’autonomie des acteurs impliqués. C’est donc dire qu’en contexte de vécu partagé, le système de responsabilité doit être pensé, planifié et adapté de sorte qu’il rende possible les interactions appropriées pour un milieu spécialisé. Ils ont ajouté que le système de responsabilité peut aussi être présent lors des interventions sur le champ. Il devient alors la responsabilité de l’éducateur, naturel ou professionnel, mais aussi celle du sujet pendant l’intervention.
Rôle du système de responsabilité
Afin de bien intégrer et appliquer le système de responsabilité, il est nécessaire de bien comprendre le rôle que celuici joue dans l’intervention. L’objectif du système de responsabilité est de favoriser et de renforcer tant la participation du jeune à sa démarche de réadaptation, que le bon fonctionnement du milieu qui l’encadre et l’alimente. Le système de responsabilité s’inscrit donc dans la perspective plus large qui veut amener le sujet à prendre conscience de ses actes et à expérimenter son autonomie de manière pratique. En faisant du système de responsabilité une composante spécifique du milieu, il est plus facile? de véhiculer efficacement au jeune le message qu’il est bel et bien le sujet de l’intervention et que celle-ci ne peut réussir sans qu’il s’y engage, s’investisse et travaille avec les éducateurs et le milieu à en atteindre les objectifs (Gendreau 2001). En effet, un des objectifs communs à tous les jeunes en réadaptation est de les amener à être les plus autonomes possibles. Le système de responsabilité est la composante désignée pour permettre le développement de l’autonomie et la prise en charge de soi (Bernier, 2008). Ainsi, cette composante est essentielle à l’intervention pour la poursuite et l’atteinte des objectifs de la réadaptation. De plus, la responsabilisation des différents acteurs permet de favoriser l’« empowerment » (appropriation) de ceux-ci. Finalement, l’instauration d’un système de responsabilité permet de créer et d’alimenter un esprit dynamique dans un milieu d’intervention. Or, c’est cet esprit dynamique qui, de par l’aspect stimulant qu’il apporte à l’intervention, permet à cette dernière de prendre en bonne partie son sens.
Le système de responsabilités et les acteurs de l’intervention psychoéducative
Le système de responsabilité est une composante satellite. En soit, il est influencé par les sujets, les éducateurs ainsi que les objectifs visés. Toutefois, il est également influencé par toutes les autres composantes satellites. Par exemple, si la composante programme est modifiée, cela peut entraîner une modification dans la responsabilité accordée aux sujets et aux intervenants.
Encart 1 : Situation de la composante système de responsabilités
(Gendreau, Prince, & Bernier, 2005).
Il est particulièrement intéressant de s’attarder aux interactions entre la composante système de responsabilités et les acteurs de la structure d’ensemble, c’est-à-dire les interactions suivantes (Gendreau, Prince, & Bernier, 2005b) :
- Sujets : sujet et groupe de pairs
- Éducateurs : les éducateurs en général, les éducateurs professionnels désignés (également nommé « éducateur professionnel accompagnateur spécifiquement désigné » ), le chef de service
- Les parents
Le système de responsabilités et les sujets
L’instauration d’un système de responsabilités pour un sujet signifie que le milieu tient à l’impliquer dans la poursuite de ses objectifs de réadaptation. Cela fait en sorte que le sujet est actif dans sa démarche personnelle. En tenant compte des capacités réelles et actuelles du sujet, des capacités du groupe ainsi que de celles de l’ensemble du milieu, un milieu qui se centre sur une participation véritable du sujet propose des tâches, des rôles et des fonctions qui correspondent à la réalité intrinsèque et nécessaire aux sujets.
Il est possible d’identifier trois sphères générales dans lesquelles un sujet peut être amené à prendre des responsabilités :
- La prise en charge de son bien-être personnel, par exemple l’hygiène, l’alimentation, le sommeil, etc.
- Le soin du matériel et de l’environnement et ce, dans l’ensemble des contextes de vie du sujet par exemple l’unité, la maison, l’école, etc.
- Les responsabilités en regard de la démarche de réadaptation par exemple, la participation au plan d’intervention, aux rencontres de suivis, aux activités, aux interventions qui lui sont adressées, etc.
Seule une véritable connaissance du sujet permet à l’éducateur de bien cerner les zones comportementales dans lesquelles celui-ci peut être amené à assumer plus de responsabilités face à lui-même et face aux autres. Une faiblesse de sa part ou un manque d’habiletés n’en font pas un coupable ni un irresponsable (Gendreau 2001). De cette façon, le système de responsabilités stimule l’évolution et ne l’inhibe pas.
Au plan clinique, le système de responsabilités prendra l’allure d’un schéma de répartition des tâches que le jeune doit accomplir et des rôles qu’il doit assumer dans le contexte du vécu éducatif partagé et de la vie de groupe (Gendreau; 2001). Notons que le système de responsabilités ne se limite pas à confier au jeune des tâches d’entretien ménager, ou, à l’autre bout du spectre, à tenter d’en faire un surveillant ou un « éducateur substitut».Ce n’est pas la transformation des autres jeunes qu’on lui demande d’assumer mais la sienne. Le système prévoit plutôt la prise en main par le jeune de tâches à sa mesure. La réalisation de ces tâches lui permettrons de devenir significatif à ses propres yeux et à ceux de ses pairs et de faire sien le milieu dans lequel il vit.
Le système de responsabilités et le groupe de pairs
Tel que mentionné plus haut, il importe de tenir compte de l’influence du groupe de pairs dans le développement d’un système de responsabilités. Le groupe est un élément important de la mise en œuvre de l’apprentissage à la prise de responsabilités. Présentées, vécues et perçues comme des tâches ou des rôles qui contribuent de manière significative à l’enrichissement de la vie de groupe et de la démarche de chacun, les responsabilités dépassent le sens de corvées ou de jeux symboliques et deviennent des responsabilités réelles (Gendreau 2001).
Il est possible de préciser que lorsqu’il est planifié, organisé et animé de façon stimulante et dynamique, le système de responsabilités mis en place dans un groupe contribue, d’une part, à l’atteinte des objectifs de chacun et d’autre part, alimente l’émergence d’interactions relationnelles appropriées. Celles-ci se traduisent par un climat harmonieux et un soutien mutuel entre les pairs (Gendreau, Prince, & Bernier, 2005b). Les responsabilités et les tâches correspondent à des défis potentiellement stimulants pour le groupe. Elles n’en demeurent pas moins influencée par la vie de l’unité et ne sont pas un jeu. Au contraire, elles sont réelles, utiles et fonctionnelles. De plus, elles contribuent à alimenter positivement le climat du groupe.
De nombreuses responsabilités sont particulièrement affectées par le groupe de pairs, par exemple : mettre la table en collaboration avec un autre sujet, l’organisation d’une activité avec plusieurs autres sujets , l’accompagnement d’un sujet par un autre à son lieu de travail, , qu’un sujet soit responsable de l’accueil des nouveaux venus, etc.
Plus que la somme des parties, le groupe de pairs est une entité vivante. Comme les individus, il connaît, lui aussi, des phases de stabilité, de déséquilibre et d’adaptation. Cette caractéristique entraîne le fait que l’apprentissage progressif des responsabilités proposées au groupe de pairs est déterminé en fonction de son potentiel, de ses difficultés et des opportunités qu’offre le milieu. Le détail des composantes de la structure d’ensemble et la description de leurs interactions permettent d’éclairer l’observation et l’évaluation des responsabilités à proposer tant au groupe qu’au sujet.
Au plan de l’application clinique, pour arriver à développer un bon système de responsabilités, l’éducateur doit accepter une certaine dose de tâtonnements et d’incertitudes de la part des jeunes. Ainsi, apprendre à des sujets à assumer des responsabilités, c’est aussi accepter de prendre des risques. En effet, il est possible de croire que des sujets puissent avoir des difficultés à actualiser certaines capacités au niveau des responsabilités. Ces risques sont toutefois inévitables en contexte d’apprentissage, mais ils peuvent néanmoins être modérés en procédant préalablement à une évaluation des capacités d’assimilation, d’accommodation et d’adaptation du groupe de pairs (Gendreau, Prince, & Bernier, 2005b).
Le système de responsabilités et les éducateurs en général
Par le biais de l’observation et de l’évaluation des capacités des sujets, les éducateurs ont la tâche de planifier et d’organiser la répartition des tâches et des rôles au sein du groupe, donc des responsabilités des sujets. Ils doivent également demeurer attentifs à l’évolution de ces derniers. D’autre part, ils doivent procéder à l’évaluation continue des interactions structurelles et relationnelles afin de constamment proposer des défis susceptibles de générer des déséquilibres chez les sujets et ce, dans le but d’accroître leur autonomie. En effet, prendre les moyens pour obtenir une connaissance appropriée des besoins du groupe figure également parmi les charges des éducateurs. Ainsi, l’observation, l’évaluation et la planification du système de responsabilités engendrent l’émergence d’indices afin de cibler le plus adéquatement possible la capacité du groupe à assumer des tâches à sa mesure. Gendreau (2001) rappelle qu’il revient à l’éducateur de voir à ce que les sujets aient des responsabilités, c’est-à-dire qu’ils participent à leur démarche et à la vie du milieu en ne se contentant pas d’un rôle de spectateur.
De plus, en contexte de vécu éducatif partagé, l’éducateur a également la responsabilité de préparer ses moments de présences auprès des sujets. Par exemple, la lecture du journal de bord ou des dossiers,permet de supporter sa préparation et, éventuellement, ses interventions (Gendreau, Prince, et Bernier, 2005b).
Ensuite, comme membre d’une équipe, l’éducateur a aussi la responsabilité d’alimenter un climat harmonieux au sein de son groupe de travail. Ce rôle est important puisque les éducateurs servent de mentors et influencent les interactions qu’entretiennent les pairs entre eux dans leur propre groupe de pairs (Gendreau, Prince, et Bernier, 2005b).
A cela s’ajoute toutes les responsabilités inhérentes des éducateurs en lien avec un programme général, un programme spécifique ou une activité auxquels est appliquée la structure d’ensemble dans le cadre d’une intervention psychoéducative. Il s’agit, par exemple, de la planification d’une activité, de la mise à disposition du matériel nécessaire, de la garantie d’un climat sécuritaire, etc.
Le système de responsabilité et l’éducateur professionnel désigné
En vertu du mandat légal que lui confie son organisation, l’éducateur professionnel accompagnateur spécifiquement désigné a la responsabilité d’orchestrer la démarche de réadaptation du sujet qu’il accompagne. D’abord, en coopération avec l’ensemble des acteurs de la démarche, incluant le sujet lui-même et ses parents, l’éducateur d’accompagnement doit produire, à partir des observations recueillies, l’évaluation des forces, des difficultés et des besoins du sujet. Ensuite, il a la responsabilité de guider l’ensemble des acteurs de l’intervention (sujets, parents, autres intervenants) dans la formulation des objectifs à atteindre. L’éducateur doit ègalement assurer la mise en place des conditions permettant au sujet de vivre des défis stimulants susceptibles de contribuer à l’atteinte des objectifs planifiés. Enfin, l’éducateur professionnel accompagnateur a la responsabilité de l’animation et de l’utilisation du vécu éducatif partagé. Ces rencontres devraient être animées dans une perspective permettant au sujet d’accéder à une autonomie accrue face à lui et aux autres et ce, en fonction de ses besoins mais également en considérant les exigences de son milieu (Gendreau, Prince, et Bernier, 2005b).
Finalement, à ces responsabilités s’ajoutent également celle de communiquer les informations pertinentes à l’ensemble des acteurs impliqués dans la démarche de réadaptation du sujet (Gendreau, Prince, et Bernier, 2005b).
Le système de responsabilité et les chefs de service
Le chef de service est imputable, sur les plans légaux et éthiques, de la protection et du développement des sujets qui lui sont confiés. Il est responsable de l’évaluation de l’atteinte des objectifs de son équipe en fonction du mandat et des orientations de l’organisation à laquelle il appartient. Le chef de service a aussi la responsabilité d’assurer un rôle de courroie de transmission permettant la communication des informations nécessaires entre le personnel et la direction de l’organisation.
Gardien de la rigueur et de l’éthique professionnelle, il a également la responsabilité de contribuer au climat harmonieux au sein de son équipe. Pour ce faire, il doit savoir identifier les interactions tant positives que problématiques entre les membres de l’équipe, avec le groupe de sujets ou avec les autres acteurs de la réadaptation. Le chef peut même être appelé à devenir un référent ponctuel pour les sujets et les autres acteurs lorsque la situation le recommande.
Le chef de service joue un rôle de mentor auprès des membres de son équipe, au même titre que les éducateurs jouent un rôle de mentor auprès de leurs jeunes. Ainsi, si l’éducateur est le gardien du sens pour ses jeunes, il en va de même pour le chef de service qui doit rappeler sans relâche les objectifs à poursuivre au cœur de la structure d’ensemble du service.
Finalement, que ce soit sur une base individuelle ou en équipe, il a la responsabilité de mettre en place des conditions favorisant le développement des compétences professionnelles inhérentes à la fonction d’éducateur professionnel en contexte de réadaptation. (Gendreau, Prince, & Bernier, 2005b).
Système de responsabilités et les parents
En 1979, au sens de la loi, les parents sont devenus les principaux responsables de leurs enfants. Depuis lors, le système de responsabilités d’un milieu de réadaptation spécialisée doit permettre aux parents de jouer leur rôle, de prendre leur place et dès que cela est possible, de prendre les décisions en ce qui concerne leur jeune, le tout en collaboration avec les éducateurs professionnels.
Il est également souhaitable que les parents collabore en participant aux rencontres où ils sont conviés, en utilisant les différents objets de communication et en participant au déroulement des activités d’intégration dans la vie familiale, selon les ententes, le plan d’intervention et les objectifs convenus conjointement (Bernier, 2008).
Applications cliniques du système de responsabilités
Comme cela a été illustré dans la section précédente, l’application du système de responsabilités dépend de l’acteur pour laquelle elle est définie. Toutefois, celle-ci dépend également de l’échelle à laquelle on souhaite l’appliquer. En effet, selon qu’il s’agisse de l’ensemble du milieu ou d’une activité précise, le système de responsabilités ne s’appliquera pas de la même façon. Renou (2005) recense trois principaux niveaux où le système de responsabilités peut être appliqué : 1) à l’ensemble du milieu, 2) à chacun des programmes spécifiques ou des activités routinières, et 3) à chacune des périodes d’une intervention. Il met en valeur par cette précision les liens entre la composante système de responsabilités et la composante « programme et contenu ».
Au niveau pratique, il importe de différencier les notions de tâches, de rôles, de fonctions et de statut.
– Les tâches comprennent ce qui est à faire, dans un contexte spatio-temporel donné, à l’intérieur d’une relation logique et fonctionnelle avec les autres composantes de la structure organisationnelle de l’intervention. Les tâches confiées se doivent donc d’être nécessaires ou pour le moins utiles (Renou, 2005). Par exemple, pour un jeune ayant subis de la négligence et dont l’hygiène manque, il pourrait s’agir de « se brosser les dents tous les jours » et de « rappeler aux autres membres de son unité de se laver les dents». L’éducateur peut avoir comme tâche de « rappeler au jeune de se laver les dents si celui-ci ne l’a pas encore fait avant de se coucher ».
– Les rôles, quant à eux, peuvent être compris comme un modèle organisé de conduites d’un individu, reliés à la position qu’il occupe dans l’ensemble organisationnel comprenant les autres acteurs concernés et les autres composantes du réel (Renou, 2005; Gendreau, Prince & Bernier, 2005b). Par exemple, un chef de service n’aura pas les mêmes responsabilités que les éducateurs de plancher dans une unité.
– Les fonctions concernent l’officialisation du ou des rôles qui se doivent d’être joués dans une structure organisationnelle pour que les tâches nécessaires à son équilibre dynamique s’accomplissent (Renou, 2005; Gendreau, Prince, & Bernier, 2005b).
– Finalement, le statut représente la reconnaissance au niveau le plus large dans une structure donnée de la fonction (Renou, 2005).
Par exemple, si je demande à un groupe de jeune de s’occuper de la création et de la réalisation d’une pièce de théâtre, il y aura la création de rôles différents tels que « acteur », « metteur en scène », « responsable des costumes », « éclairagiste », etc. Certains de ces rôles ont un statut différent. Par exemple, si l’on compare celui qui aura le rôle d’acteur principal a celui qui fait de la figuration, l acteur principal peut avoir un rôle considéré comme plus prestigieux ou important. De plus, chaque rôle sera attaché à des fonctions différents : l’acteur a comme fonction de jouer la pièce, alors que le responsable des costumes a comme fonction que les costumes soient prêts pour la pièce et de bonne qualité. Afin d’atteindre ces objectifs, chaque rôle sera rattaché à des tâches différentes, ainsi, l’acteur devra réviser ses textes et venir aux répétitions, tandis que l’éclairagiste devra apprendre à manier les outils d’éclairage et apprendre la séquence à effectuer pour le spectacle.
Rôle |
Fonction |
Tache |
Acteur | – Jouer la pièce | – Réviser ses texte- Venir au répétition- … |
Responsable des costumes | – Que les costumes soit prêt pour la pièce | – Choisir les costumes- Fabriquer les costumes- Apporter les costumes- … |
… | … | … |
Afin de mieux illustrer l’application de la composante système de responsabilités,l’exemple utilisé pour la structure d’ensemble peut être approfondi :
Responsabilités dans l'exemple utilisé pour la structure d'ensemble
Responsabilités des animateurs :
- Préparer les activités
- Apporter tout le matériel nécessaire
- Favoriser un cadre sécurisant pour les sujets
- Soutenir les sujets dans l’exécution des activités
Responsabilités des sujets :
- Participer aux activités
- Laisser les autres sujets participer aux activités
- Respecter le code défini
Responsabilités des autres intervenants :
- Participer à la rencontre hebdomadaire avec l’éducateur afin de connaître le contenu abordé durant la séance
- Soutenir les sujets dans l’application du contenu vu dans le groupe, en fonction des recommandations des animateurs.
Responsabilités des parents:
- Lire le contenu du carnet de communication de manière régulière.
- Soutenir les sujets dans l’application du contenu vu dans le groupe, en fonction des recommandations des animateurs.
Soutiens empiriques
Étant donné qu’à ce jour, il n’existerait aucune recherche soutenant la théorie de la structure d’ensemble ou de son efficacité lors de l’application, cela implique qu’il en est de même pour la composante système de responsabilités.
Toutefois, tel que précisé précédemment, il est postulé que le système de responsabilités représente un moyen d’améliorer l‘empowerment, concept qui a été proposé comme un facteur qui :
- Améliore l’efficacité des interventions sur différentes problématiques par exemple, le traitement des dépendances (Wood, Englander-Golden, Golden et Pillai, 2010);
- Favorise le développement de l’estime de soi et du sentiment d’efficacité personnelle. L’estime de soi a notamment été identifiée comme influençant le support social, la résilience ainsi que la prévention de la dépression, de l’anxiété ou des idéations suicidaires. Le sentiment d’efficacité personnelle a été identifié comme favorisant notamment les performances scolaires et sportives, le bien-être, la persistance, la satisfaction professionnelle, les pratiques sexuelles sécuritaires ainsi que l’arrêt ou la prévention de consommation du tabac (Morton & Montgomery, 2011)
De la même façon, il est postulé que le système de responsabilités est un moyen d’améliorer l’implication des parents, or celle-ci est reconnue comme permettant d’augmenter l’efficacité des interventions et ce, pour plusieurs problématique, tels que le traitement de l’anxiété des enfants (Khanna et Kendall, 2009) ou le traitement des dépendances (Shelef, Diamond, Diamond, & Liddle, 2005).
Conclusion
Tel que précisé dans cet article, la composante système de responsabilités est une constituante essentielle de tout milieu et de toute intervention psychoéducative. Sa mise en valeur dans la structure d’ensemble représente donc une aide importante dans l’élaboration de programmes et d’interventions de qualité.
Toutefois, de la même façon que des soutiens empiriques doivent être développés pour valider la structure d’ensemble, des études devront être produites afin d’améliorer la compréhension et l’application de la composante système de responsabilités.
Bibliographie
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Gendreau, G., & Boscoville 2000 (2003). Le modèle psychoéducatif : Module 11 : Système de responsabilités [DVD]. Montréal : Boscoville 2000 et les recherches actions Gilles Gendreau.
Gendreau, G., Prince, D. & Bernier, M. (2005a). Les fiches d’exercices Module 11 : Système de responsabilités. Montréal : Boscoville 2000.
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Shelef, K.S., Diamond, G.M., Diamond, G.S., & Liddle, H.A. (2005) Adolescent and Parent Alliance and Treatment Outcome in Multidimensional Family Therapy , Journal of Consulting and Clinical Psychology, 73 (4), 689-698
Wood, T.E., Englander-Golden, P., Golden, D., & Pillai, V.K. (2010) Improving addictions treatment outcomes by empowering self and others, International Journal of Mental Health Nursing, 19, 363–368
Compléments
Comment citer
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