Groupe de pairs (Composante)

Résumé:

Le groupe de pairs est l’une des composantes de la structure d’ensemble. Celle-ci a été publiée pour la première fois par Gilles Gendreau en 1978 dans le livre «L’intervention psycho-éducative Solution ou défi?». Elle a depuis été améliorée et retravaillée notamment par Gendreau (Gendreau 2001; Gendreau, Prince, & Bernier, 2005) et Renou (2005)

Le groupe de pairs peut être compris comme étant les personnes qui partagent avec les sujets un certain nombre de caractéristiques. Celles-ci peuvent être familiales (fratrie), mésologiques (même école, centre, activité, etc.) ou circonstancielles (gangs, amis, coéquipiers, etc.).

L’objectif de cet article est de permettre au lecteur de se familiariser avec le concept de groupe de pairs dans le cadre de la structure d’ensemble, ainsi qu’avec son application pratique.

  • 1) Quelle est l’importance de ce concept dans la théorie psychoéducative?

La structure d’ensemble est l’un des concepts théoriques majeurs en psychoéducation. Son utilisation est d’ailleurs l’une des caractéristiques qui tendent à distinguer la psychoéducation des autres disciplines sociales. Le groupe de pairs en tant que composante de celle-ci est donc essentiel.

  • 2) Quel est le niveau de connaissance associé à ce concept?

Plusieurs recherches traitent du groupe de pairs sur un sujet. Ces influences peuvent être autant positives que négatives et commencent à être bien documentées.

  • 3) En quoi ce concept est-il important dans la pratique psychoéducative aujourd’hui?

La structure d’ensemble est considérée généralement comme un élément central de la psychoéducation en tant que méthodologie de pratique (Renou 2005). Le groupe de pairs en tant que composante de celle-ci est donc essentiel.

Introduction:

L’objectif de cet article est de présenter la composante groupe de pairs sous un angle théorique. Dans un premier temps, nous définirons la composante groupe de pairs et nous situerons celle-ci dans la structure d’ensemble. Dans un deuxième temps, Nous aborderons les principales applications cliniques de cette composante. Nous aborderons ensuite les soutiens empiriques sur le groupe de pairs. Finalement, nous terminerons par une courte conclusion.

Définitions

La composante groupe de pairs a été définie par Gendreau de la façon suivante : « Le jeune que ce soit dans son milieu naturel ou dans un milieu spécialisé appartient à un groupe de pairs qui l’influence et qu’il influence en retour.Dans ce modèle, le groupe de pairs désigne en particulier les pairs qui participent à un même programme, s’influencent mutuellement dans leur démarche respective, interagissent ensemble, réalisent ensemble les mêmes activités et parfois habitent un même lieu» (Gendreau, 2001 ).

Cette définition a été reprise et complétée par Renou (2005). Celui-ci a défini les pairs comme étant les personnes qui partagent avec les sujets un certain nombre de caractéristiques. Celles-ci peuvent être familiales (fratrie), mésologiques (même école, centre, activité, etc.) ou circonstancielles (gangs, amis, coéquipiers, etc.). Ces personnes sont considérées comme des sujets quand elles sont comprises dans la cible de l’intervention.

Finalement, Marc Bernier (2008) a précisé que la composante groupe de pairs pouvait être incarnée par différents acteurs selon le contexte de l’activité psychoéducative. Ainsi, la fratrie pourrait par exemple constituer ce groupe en contexte d’intervention familiale. L’activité psychoéducative en milieu scolaire pourrait quant à elle considérer le groupe de pairs de la classe comme étant une source précieuse de soutien pour le sujet vers l’atteinte de ses objectifs.

Emplacements dans la structure d’ensemble:

La composante groupe de pairs se trouve liée à la composante sujet. Bien que ses relations n’apparaissent pas sur le schéma, elle possède les mêmes interrelations que la composante sujet, c’est-à-dire avec les autres composantes de l’axe central ainsi qu’avec la totalité des composantes satellites.

Groupe de pairs

Gendreau, Prince, & Bernier, 2005b)

L’objectif derrière l’association de ces deux composantes est de signifier que si la démarche de réadaptation est toujours une démarche individuelle, elle est souvent fortement influencée par l’appartenance au groupe de pairs. Ainsi, les éducateurs ne perdent jamais de vue que le groupe est à la fois une réalité qu’ils ne peuvent ignorer et un outil à maîtriser dans leurs interventions que celles-ci soient ponctuelles, individuelles ou de groupe (Gendreau, 2001) Le groupe est parfois perçu comme porteur d’influence négative, toutefois une bonne utilisation de celui-ci peut être un levier pour atteindre les objectifs visés. En effet, les pairs peuvent devenir des co-animateurs du vécu éducatif partagé et devenir des influences positives quant à la réussite de l’intervention (Bernier, 2008).

Applications cliniques

Capsul et Lemay (1996 dans Gendreau, Prince & Bernier, 2005a) proposent d’aborder l’intervention auprès des groupes sous l’angle des quatre dimensions suivantes :

  • les conditions pour qu’un groupe puisse fonctionner
  • les facteurs influençant les interactions entre les membres
  • les objectifs qu’un groupe rééducatif peut essayer d’atteindre
  • les difficultés auxquelles l’intervenant risque d’être confronté.

Concernant les conditions pour qu’un groupe puisse bien fonctionner, les auteurs précisent que les membres doivent avoir un certain désir de participer à une vie collective, qu’il faut établir des relations d’échanges entre eux, qu’ils doivent se définir des buts communs et qu’ils doivent aboutir à un minimum de cohésion sous peine d’éclatements ou de tensions insupportables. L’intervenant doit veiller à maintenir ces conditions minimales puisque sans elles, le sujet de l’intervention ne peut pas y développer un sentiment d’appartenance positif et atteindre les objectifs qui lui sont proposés. Lorsque ces conditions minimales ne sont pas atteintes malgré les efforts de l’intervenant, l’existence du groupe doit être remise en question.

Quant aux facteurs influençant les interactions entre les membres, Capsul et Lemay (1996 dans Gendreau et al, 2005a) distinguent notamment les raisons du regroupement et l’influence des pressions extérieures, les caractéristiques des sujets eux-mêmes, le système interactif, les conditions d’existence et les modes d’animation. L’intervenant doit tenir compte de chacune de ces influences afin de veiller à ce que les interactions du groupe permettent d’atteindre les objectifs.

À ce sujet, Capsul et Lemay (1996 dans Gendreau et al, 2005a) nous rappellent qu’un groupe rééducatif peut poursuivre de nombreux objectifs :

  • Le groupe comme lieu de socialisation ;
  • Le groupe pour se reconnaître dans son propre fonctionnement vis-à-vis de l’autre ;
  • Le groupe comme lieu d’apprentissage de multiples fonctions inhérentes à la vie collective ;
  • Le groupe comme lieu de réalisation ;
  • Le groupe comme lieu d’expression ;
  • Le groupe comme lieu de rencontre ;
  • Le groupe comme porteur de normes.

Chacun de ces objectifs implique le développement d’interactions différentes entre les membres du groupe et l’animation de la part de l’éducateur devra être adaptée en conséquence.

Bien que pouvant favoriser l’atteinte des objectifs, l’utilisation du groupe peut confronter l’intervenant à différentes difficultés. Capsul et Lemay (1996 dans Gendreau et al, 2005a) distinguent particulièrement les difficultés propres à l’intervenant sur le plan personnel (ex. : difficulté personnelle dans le schème de sécurité de l’éducateur pour gérer des groupes), les difficultés propres aux types de jeunes regroupés (ex. : jeunes souffrant d’anxiété sociale) et les difficultés liées au cadre institutionnel (ex. : manque d’une salle adaptée). L’utilisation du groupe exige chez l’intervenant de développer un savoir-faire spécifique (savoir-faire avec, dans et par le groupe) mais également un savoir et un savoir-être spécifique. On peut citer en exemples toutes les méthodes d’intervention de groupe, les théories sur les dynamiques de groupe, etc.

Afin d’illustrer la composantes groupes de pairs, nous avons choisi de reprendre l’exemple de l’article sur la structure d’ensemble. Nous illustrerons d’abord une situation où le sujet est le groupe puis une situation ou le sujet est un élève en particulier.

Soutiens empiriques

Bien qu’il n’existe pas d’étude spécifique soutenant la structure théorique de la structure d’ensemble, et incidemment la composante de groupe de pairs, l’influence du groupe est un objet de recherche majeur dans le cadre de la psychologie sociale (Vallerand, 2006) ou de la psychopathologie (Dumas, 2007)

Le groupe marque une influence dès la période préscolaire (Berk,2008).. Par la suite, dès que l’âge scolaire est atteint, la famille commence peu a peu à perdre son emprise sur l’enfant au profit du groupe d’amis (Bar-Tal et al. 1991 ; Berndt, 1979 dans Vallerand, 2006). Le groupe de pairs qui se forme en milieu scolaire a été reconnu en matière de puissance comme le deuxième agent de socialisation tout de suite après la famille (Vallerand, 2006). Les effets sont variés et peuvent être de connotation à la fois positive et négative. Par exemple, si la plupart des pairs d’un sujet consomme la cigarette ou font usage d’alcool, cela augmente significativement la probabilité du sujet d’utiliser ces substances (Aloise-Young, Graham et Hanse, 1994). Le seul fait de croire que la plupart des ses amis sont favorables à la consommation d’alcool peut influer à la hausse sa consommation, et ce même si cette croyance est erronée (Prentice & Miler dans Vallerand, 2006). Ainsi, il est possible de croire que cette influence peut être positive également.

Plusieurs théories permettent une compréhension plus détaillée des différentes formes d’influences du groupe sur un sujet, dont les théories de l’apprentissage social, la théorie systémique ou la théorie écologique de Bronfenbrenner.

Conclusion

La composante groupe de pairs est sans aucun doute un apport intéressant dans le cadre de nombreuses interventions. Toutefois le fait que, comme le rappelle Marc Bernier (2008), il ne soit pas présent dans toutes les interventions nous pousse à nous demander si sa place de composante à part entière est justifiée.

L’existence de cette composante implique non seulement le développement de savoir-faire spécifiques mais également d’évaluer systématiquement le rôle du groupe de pairs en intervention afin d’en déterminer les impacts et limiter les effets iatrogènes.

Référence :

Berk, L. (2008). Infants and children, sixth édition. USA, Pearson, Inc.

Bernier, M. (2008). La structure d’ensemble du modèle psychoéducatif : un système en progression constante. En pratique, 8, 15-16.

Dumas, J.E. (2007). Psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent (3ème édition). Bruxelles, Belgique : Groupe De Boeck.

Gendreau, G. (1978). L’intervention Psycho-éducative. Solution ou défi ?. Paris, France : Editions Fleurus.

Gendreau, G. (2001). Jeunes en difficulté et intervention psychoéducative. Montréal, Québec : Édition Béliveau.

Gendreau, G., & Boscoville 2000 (2003). Le modèle psychoéducatif: Module 6: Autres professionnels et le groupe de jeunes (pairs) [DVD]. Montréal, Québec: Boscoville 2000 et les recherches actions Gilles Gendreau.

Gendreau, G., Prince, D. & Bernier, M. (2005a). Les fiches d’exercices Module 6b : Les groupes de pairs. Montréal, Québec : Boscoville 2000.

Gendreau, G., Prince, D. & Bernier, M. (2005b). Manuel d’accompagnement Module 6b : Les groupes de pairs. Montréal, Québec : Boscoville 2000.

Renou, M. (2005). Psychoéducation, une conception, une méthode. Montréal, Québec : science et culture.

Vallerand, R.J. (2006). Les fondements de la psychologie sociale (2ème édition). Montréal, Québec : Gaëtan Morin éditeur.

 

Compléments

Comment citer

Schüle, M. O. (2014). Groupe de pairs. Dans Unipsed.net. Repéré à http://www.unipsed.net/?p=1208

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