Considération (Schème relationnel)

Résumé

La considération fait partie des six schèmes relationnels décrits par Gilles Gendreau, avec la congruence, la disponibilité, l’empathie, la confiance et la sécurité (Gendreau 2001). Elle fait référence au droit fondamental d’être reconnu pour ce que nous sommes et ce que nous représentons. Il s’agit d’un sentiment d’estime et de respect inconditionnel porté envers un être humain. Elle se manifeste dans la capacité à attribuer une valeur unique à une autre personne, sans égard aux apparences extérieures ou à ses actions.

Le présent article à pour but de permettre au lecteur de se familiariser avec le schème relationnel de la considération ainsi qu’avec son application pratique.

1) Quelle est l’importance de ce concept dans la théorie psychoéducative?

La considération fait partie du Savoir-être de l’intervenant et constitue, avec les cinq autres schèmes relationnels, le cadre de référence pratique en psychoéducation. En intervention, la considération constituerait le moteur de toute relation d’aide (Le Bourdais, 1990).

2) Quel est le niveau de connaissance associé à ce concept?

Il existe peu de recherches empiriques faites sur la considération. À notre connaissance, aucune étude n’a été produite pour soutenir la structure théorique du modèle dans l’intervention. Il s’agit de plus d’un sujet qui est difficilement observable et mesurable de façon opérationnelle.

3) En quoi ce concept est-il important dans la pratique psychoéducative aujourd’hui?

Selon Gendreau (2001), la considération se retrouverait tant chez l’intervenant que chez le sujet et influencerait la qualité des interactions entre le deux protagonistes. Elle permettrait le développement d’un climat sécurisant dans la relation d’aide et favoriserait un apprentissage véritable chez le sujet impliqué (Brazier, 1993)

Introduction

L’intervention psychoéducative réfère aux schèmes relationnels dans l’interaction entre l’aidant et l’être aidé (Gendreau, 2001). Ces schèmes sont des outils internes que l’intervenant possède et qui vont teinter la qualité de ses relations avec les autres. La relation d’aide peut être décrite comme l’interaction entre deux personnes; l’une va tenter, par ses actions, de fournir les conditions essentielles afin que l’autre ait une réponse à ses besoins fondamentaux (Le Bourdais, 1990). Afin de satisfaire ces besoins, l’intervenant doit donc adopter certaines attitudes qui faciliteront la rencontre entre le vécu de la personne aidée et l’intervention mise en place. En psychoéducation, ces attitudes réfèrent aux schèmes relationnels, qui font partie du savoir-être de l’intervenant (Gendreau, 2001).

Dans le présent texte, le schème de la considération sera défini sous différents aspects : le cadre théorique sous-jacent, l’application dans le domaine de la psychoéducation, ainsi que les recherches empiriques existantes sur le sujet.

Cadre théorique

En psychoéducation, la considération fait partie des six schèmes relationnels décrits par Gilles Gendreau, avec la congruence, la disponibilité, l’empathie, la confiance et la sécurité (Gendreau 2001). La considération fait référence au droit fondamental de justice sociale d’être reconnu pour ce que nous sommes et ce que nous représentons. Plus concrètement, il s’agit d’un sentiment d’estime et de respect inconditionnel porté envers un être humain. Elle se manifeste dans la capacité à attribuer une valeur unique à une autre personne en lui reconnaissant une dignité humaine, sans égard aux apparences extérieures ou à ses actions. Il s’agit de lui reconnaitre une égalité en tant que personne, peu importe les comportements qu’elle manifeste et même s’ils diffèrent des attentes à son égard ou des valeurs qui sont véhiculées dans l’intervention (Gendreau, 2001).

Cadre historique

Le psychologue américain Carl Rogers a beaucoup influencé le modèle des schèmes relationnels développé par Gilles Gendreau (Le Bourdais, 1990). Ainsi, centré sur la relation d’aide, Rogers est l’un des premiers à avoir mis de l’avant des conditions nécessaires afin de promouvoir l’efficacité dans l’interaction (Brazier, 1993). Il a mis l’emphase sur la nécessité à démontrer des attitudes de bases d’empathie, de congruence, d’authenticité et de transparence dans la relation thérapeutique (Brazier, 1993). Il a élaboré sa vision que l’Homme a fondamentalement quelque chose de positif en lui. Il a également fait référence à la considération positive inconditionnelle, une croyance en l’autre et au fait qu’il possède les capacités à évoluer. Lorsque Gilles Gendreau a développé le concept de relation psychoéducative à partir de 1969, il s’est inspiré des prémisses de Rogers pour détailler les conditions nécessaires au développement d’une relation significative spécialisée (Gendreau, 2001). Le concept du savoir-être en intervention et le modèle des schèmes relationnels furent alors abordés.

Application clinique

En intervention, la considération constitue le moteur de toute relation d’aide (Le Bourdais, 1990). Ainsi, en ayant un respect inconditionnel pour l’autre, l’intervenant est en mesure de partir de ce qu’il est pour adapter ses interventions. La considération requiert un effort d’objectivité de la part de l’intervenant pour être en mesure de dépasser ce que la personne aidée démontre aux premiers abords (dans son apparence, dans ses comportements ou ses cognitions par exemple). Pour ce faire, l’intervenant doit s’efforcer de dépasser son égocentrisme professionnel et s’exercer à l’inconditionnalité dans l’intervention. Cela implique de manifester une attitude positive vis-à-vis l’autre personne et de démontrer concrètement une conscience de la valeur de l’autre dans les actions posées. Il est nécessaire de démontrer une attitude de croyance en l’autre, sans l’identifier aux comportements et choix qu’il démontre. Cela n’implique cependant pas d’être en accord avec tous ses choix et gestes, mais bien de travailler à partir de ce que la personne représente. Le fait d’accorder le respect inconditionnel à l’être aidé ne signifie pas que l’intervenant doit aller à l’encontre de ses propres valeurs, ni qu’il soit tenu de ne pas intervenir ou de cautionner tous les comportements de l’autre personne. En fait, faire preuve de considération implique l’acceptation de l’autre dans ce qu’il est, dans ses forces et ses limites, plutôt que d’être en accord avec ce qu’il met en place dans sa vie. Ainsi, il ne s’agit pas de juger l’autre selon les codes de références qui nous sont propres, mais plutôt de le prendre et de l’accepter telle qu’ il est, dans son unicité et son individualité, sans mettre de condition et sans exiger qu’il se conforme à nos attentes (Gendreau, 2001). Grâce à ce schème, il devient possible de mettre sur pied des interventions adaptées, qui seront reçues plus positivement par la personne aidée. Cela lui permettra alors de se sentir comprise, acceptée et respectée dans ce qu’elle incarne (Gendreau 2001). La connaissance que l’intervenant a de la personne avec qui il est en interaction va faciliter l’exercice de la considération et apportera une certaine chaleur dans les interventions (Le Bourdais, 1990). La considération positive inconditionnelle permet le développement d’un climat sécurisant dans la relation d’aide et favorise un apprentissage véritable chez l’aidé (Brazier, 1993). Ainsi, démontrer de la considération amènerait l’intervenant à voir la personne en devenir que représente l’aidé. Cette vison lui permettrait ensuite de mettre en place des interventions adaptées afin d’aider la personne à s’affranchir de son passé et de ses comportements, et à réaliser son plein potentiel (Salomé, 2003).

Selon Gendreau (2001), la considération peut également se retrouver au niveau de l’environnement du sujet. Pour que le sujet en vienne à avoir de la considération pour lui-même, il lui est nécessaire d’avoir de la considération pour les conditions de son environnement. Il est essentiel que le sujet soit préalablement capable d’attribuer une valeur positive à la situation éducative dans laquelle il se trouve pour se montrer ensuite disponible à s’impliquer dans sa démarche de changement. Il est donc important d’organiser l’environnement du sujet afin que cela devienne un milieu de vie dans lequel il se sentira considéré et pour lequel il aura en retour un sentiment de respect. Cela lui permettra d’atteindre un certain niveau de considération pour lui-même, de même qu’une meilleure connaissance de soi (Salomé, 2003). Ainsi, s’il se sent reconnu et accepté tel qu’il est, cela augmente les chances qu’il puisse aussi se reconnaitre et s’accepter lui-même (Salomé, 2003). La considération qui lui est démontrée lui accorde alors la liberté d’être lui-même et d’agir en fonction de ce qu’il est.

Selon Gilles Gendreau (2001), la considération réfère également à la notion d’estime de soi et peut être analysée du point de vue de l’intervenant. Il s’agit alors pour celui-ci de s’accepter il est, de se respecter, de se reconnaitre de la valeur comme individu et des compétences comme professionnel (Gendreau, 2001). Cette acceptation qu’il a envers soi lui permettra de se sentir apte et adéquat dans l’intervention, influençant alors son ouverture à l’autre et sa confiance en soi. Il sera alors plus facile pour l’intervenant de démontrer de la considération envers le sujet puisqu’il est préalablement en mesure de s’accepter lui-même dans ce qu’il est, étant conscient de ses forces et limites.

Soutien empirique

Au niveau empirique, peu d’études ont été faites spécifiquement sur la notion de considération dans l’intervention éducative. Jacques Le Bourdais (1990), dans le cadre de son mémoire, a fait une étude dans laquelle il a évalué 122 psychoéducateurs sur leur perception des schèmes relationnels. Cette étude fait ressortir que la considération est perçue comme étant l’attitude la plus importante en relation d’aide. Elle constituerait une exigence préalable à partir de laquelle les autres attitudes peuvent se développer (Le Bourdais, 1990). Il s’agit d’une des bases du savoir-être, qui permet une ouverture véritable à l’autre. Ainsi, la capacité de l’intervenant à accepter les sujets comme ils sont, avec leurs forces et limites, et à leur reconnaitre de la valeur, lui permettrait de développer et d’améliorer les autres schèmes relationnels nécessaires au contact de la clientèle.

En conclusion, la considération démontrée, tant chez l’intervenant que chez le sujet, aura un impact sur le résultat de la relation d’aide. Ainsi, la qualité et le développement de ce schème relationnel est primordial dans l’intervention éducative. De plus, la considération est perçue comme le moteur de toute relation interpersonnelle et est vue comme essentielle par des acteurs du domaine de la psychoéducation. Il est donc important que les intervenants s’efforcent à la développer et l’appliquer dans la relation d’aide. Certains sujets peuvent susciter inconsciemment chez l’intervenant du rejet, de par leur personnalité ou encore par leurs comportements, qui peuvent heurter les valeurs de l’intervenant. Il est parfois difficile de surmonter ces obstacles pour leur démontrer de la considération. Ce manque peut alors nuire par après à l’instauration d’une relation significative et à l’intervention psychoéducative. Il importe donc de s’efforcer à comprendre l’autre et ce qu’il nous fait vivre, dans un effort de se décentrer de soi pour mieux saisir le vécu de la personne aidée. Il peut alors s’agir d’un travail à long terme de d’introspection et de développement de soi. De surcroît, il serait pertinent de mettre sur pied d’autres études empiriques permettant de valider l’impact de la considération sur la réalité de l’aidé et sur celle de l’intervenant.

Références

Brazier, D. (1993). Beyond Carl Rogers. London, UK: Constable & co.

Gendreau, G. (2001). Jeunes en difficulté et intervention psychoéducative. Montréal, QC : Sciences & Culture.

Le Bourdais, J. (1990). Les attitudes de base du psycho-éducateur dans la relation d’aide. (Mémoire de maitrise inédit). Université de Montréal.

Salomé, J. (2003) Relation d’aide et formative à l’entretien. Villeneuve d’Asy Céden, France : Presses Universitaire de Septentrum.

Comment citer

Ménard St-Germain, V. (2014). Considération. Dans Unipsed.net. Repéré à http://www.unipsed.net/index.php/articles/475-consideration

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